Guylaine Guay « Je suis heureuse d'être moi »
Entrevue
Tendre vers le bonheur, c’est une volonté profonde que l’animatrice, chroniqueuse, humoriste et auteure Guylaine Guay a toujours eue. Enfant, elle portait déjà un regard bienveillant sur l’être humain qu’elle devenait. Malgré les défis qui se placeraient sur sa route, elle savait qu’elle trouverait la force nécessaire pour se rappeler la chance qu’elle a, celle d’aimer la vie, sa vie! Rencontre avec celle qui va.
On dit qu’apprendre à s’aimer est le travail de toute une vie. Alors pourquoi certains y arrivent avant d’autres ? Guylaine Guay a vite compris que cultiver sa confiance et apprendre à être indulgente était la base d’une vie douce et bonne. « Je suis heureuse d’être moi, d’avoir ma tête et mon corps. Pour vrai, je me suis toujours considérée comme chanceuse d’être qui je suis. Je m’efforce de faire quelque chose de bien avec ce que j’ai reçu. » Allumée, vive et entière, voilà des qualités qui allaient lui servir bien plus qu’elle ne se l’était imaginée. L’amour inconditionnel de ses parents permettra, à la petite fille qu’elle était, de croire en ses capacités et d’espérer toujours plus. « J’étais et je suis un électron libre. Je me suis vite sentie différente des autres. Je voyais ce trait de caractère comme une force et non comme un handicap. J’étais rassembleuse, à l’écoute et je faisais rire mes amis ; bref, j’étais à ma place. »
©Blanches Bulles - Magazine Mieux Etre
Un mouton blond, c’est comme ça que les parents de Guylaine percevaient leur fille. Elle ne faisait pas les choses comme tout le monde, et c’était bien ainsi. Cultiver cette singularité est devenu le moteur de son existence. Est-ce épuisant d’être à contre-courant ? « C’est certain que, depuis l’arrivée des réseaux sociaux, c’est pas mal plus exigeant. Assumer ses différences aux yeux de tous peut parfois prendre des proportions complètement démesurées. Il m’arrive de prendre des pauses. Militer ou revendiquer n’est pas mon emploi à temps plein. Quand je m’exprime, je le fais consciemment et je choisis mes combats. Je n’ai jamais demandé la permission aux autres d’être moi, et ce n’est pas à 50 ans que je vais commencer. »
Avec les années, elle écoute davantage cette petite voix qui lui rappelle qu’il est préférable de réfléchir avant d’agir. « J’aimerais ça que ce soit le cas pour tout le monde, mais, hélas, ce ne l’est pas. Quand j’ai quelque chose à dire, je le fais dans le plus grand des respects. Par contre, quand quelqu’un se donne le droit de m’écrire pour me dire que je suis grosse, laide ou stupide, je n’hésite pas à bloquer. Je n’entretiens aucune haine, car je sais que derrière ces mots se cache un profond mal-être. Je ressens même de l’empathie envers ces gens malheureux. »
Parmi les causes que Guylaine tente de défendre avec amour, il y a celle de la diversité corporelle. « Je vois cette volonté de changement surtout au sein des nouvelles générations : elles sont tellement plus tolérantes. Ce qui me trouble, c’est de constater qu’il y a, en ce moment, un réel affrontement générationnel. Quand j’étais jeune, être grosse était synonyme d’une vie misérable. Je me souviens d’avoir cru que je n’aurais jamais la chance d’être amoureuse. Personne n’allait vouloir de moi. On me l’a si souvent répété. Comme je suis une éternelle optimiste, je me dis que le monde et les temps changent. »
©Blanches Bulles - Magazine Mieux Etre
Une force tranquille qui réussit à faire bouger les choses, c’est ainsi que se définit Guylaine. « Je le répète souvent, mais je capote sur moi. Je me trouve belle à voir aller. J’aime les choix que je fais, car je les assume et j’en suis fière. Malgré moi, je sais que mes mots parlent à d’autres. Je vois des filles me dire qu’elles se sentent interpellées quand je m’exprime. Rien de tout ça n’est calculé, mais tant mieux si je fais du bien à d’autres. »
Savoir bien s’entourer et choisir ses alliés est très important pour Guylaine. « La force qui m’habite, c’est aussi celle de mon clan, celui dont je prends soin, jour après jour. Mes proches me permettent de rebondir quand j’en ai besoin, ils savent me tenir la main au bon moment. Il ne faut jamais sous-estimer la force du groupe. » Étrangement, Guylaine est une grande solitaire. Ces moments de solitude lui permettent de se déposer pour mieux revenir. « Mes enfants et mon mari respectent ce besoin. Je sais que, de l’extérieur, ma vie a parfois l’air d’un chaos, mais au contraire, je me suis construit une vie bien calme et douce. Nous sommes assez casaniers et à l’aise dans la routine. Par contre, il m’arrive d’avoir besoin de me retirer : c’est plus fort que tout. C’est à ce moment-là que je pars en retraite. Dans le bois, à l’hôtel, dans un chalet, toute seule avec moi-même. J’adore le silence. Quel bonheur ! »
Depuis la parution du livre Deux enfants à la mère, où elle relate sa vie avec Léo et Clovis, ses fils vivant avec un trouble du spectre de l’autisme, Guylaine a placé l’écriture au centre de sa vie. C’est devenu essentiel à son équilibre de femme et de mère. « Quand je pars à la rencontre de mes lecteurs, je suis aux anges. J’aime tellement les salons du livre. J’ai l’impression d’appartenir à une gang, car cet univers me ressemble et me fait le plus grand bien. » Comme la culpabilité n’est pas un sentiment que connaît Guylaine, elle réussit à partir plusieurs fois dans l’année, et ce, sans aucun regret. Avouez qu’on aimerait tous être comme ça ? À travers l’écriture, elle exprime sa créativité et explore toutes les avenues sans se censurer. La liberté qu’elle trouve dans cette forme d’expression est devenue vitale.
Cette imagination débordante dont elle a hérité lui sert abondamment dans sa vie d’auteure. « Des histoires à raconter, j’en ai toujours tout plein. J’ai la chance d’écrire pour un public adulte et jeunesse. Les Éditions Libre Expression et de la Bagnole me donnent l’occasion de raconter tout ce dont je rêve. Je suis, en ce moment, en train d’écrire mon tout premier roman jeunesse, qui s’adressera aux enfants de 9 à 11 ans. Le personnage principal est une petite fille, librement inspirée de ce que j’ai été. C’est tout un défi, mais j’adore ça. Je poursuis aussi ma série de livres sur mon personnage de Clovis. L’ouvrage devrait sortir au printemps prochain. C’est inexplicable le sentiment de fierté que je ressens chaque fois qu’un de mes livres se retrouve entre les mains d’un nouveau lecteur. J’ai l’impression de laisser une véritable trace dans cet univers. Partager est la plus belle chose qui soit. »
VALÉRIE GUIBBAUD
Journaliste, animatrice et auteure • Facebook : Valerieguibbaudradiotele